La maladie de Still reste méconnue du grand public malgré son impact considérable sur la vie des patients. Cette affection rare touche environ 1 personne sur 100 000, avec deux formes distinctes selon l’âge d’apparition. La forme juvénile (SJIA) et la forme adulte (ASD) présentent des particularités qui compliquent parfois le diagnostic et la prise en charge.
Quand on parle de maladies auto-inflammatoires, la maladie de Still n’est pas forcément la première qui vient à l’esprit. Pourtant, ses manifestations, fièvres récurrentes, éruptions cutanées et douleurs articulaires, peuvent sérieusement compromettre la qualité de vie.
Au fil de cet article, nous allons explorer les spécificités de cette maladie, comprendre ses mécanismes, et surtout voir comment elle affecte différemment les enfants et les adultes.
Sommaire
Qu’est-ce que la maladie de Still ? Origines et définition
Comprendre les mécanismes de la maladie de Still
Maladie de Still enfant (SJIA) : Spécificités
Maladie de Still adulte (ASD) : Particularités
Diagnostic : Comment identifier la maladie de Still
Vivre avec la maladie de Still au quotidien
Qu’est-ce que la maladie de Still ? Origines et définition
Histoire et découverte de la maladie
C’est en 1897 que le médecin britannique George Still décrit pour la première fois cette forme particulière d’arthrite chez l’enfant. À l’époque, on ne parlait pas encore de maladie auto-inflammatoire, ce concept n’existait tout simplement pas.
Il a fallu attendre les années 1970 pour que des médecins reconnaissent une forme similaire chez l’adulte, baptisée « maladie de Still de l’adulte ». Les connaissances ont bien évolué depuis, mais cette dualité enfant/adulte reste une caractéristique fondamentale de la pathologie.
La compréhension de la maladie a fait un bond considérable ces 20 dernières années, notamment grâce aux avancées en immunologie et génétique. On cerne aujourd’hui mieux les mécanismes en jeu, même si certaines zones d’ombre persistent.
Classification médicale actuelle
D’un point de vue médical, la maladie de Still appartient à la famille des maladies auto-inflammatoires systémiques. Contrairement aux maladies auto-immunes où le système immunitaire attaque les tissus sains, dans les pathologies auto-inflammatoires, c’est le système immunitaire inné qui s’emballe.
La forme juvénile (SJIA) est aujourd’hui classée comme un sous-type d’arthrite juvénile idiopathique. La forme adulte, quant à elle, reste dans une catégorie un peu à part des autres rhumatismes inflammatoires.
Avec une incidence estimée entre 1 et 10 cas pour un million d’habitants selon les régions, la maladie de Still a le statut officiel de maladie rare. Cette rareté contribue malheureusement à la méconnaissance de la pathologie, y compris parfois dans le corps médical.
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Comprendre les mécanismes de la maladie de Still
Maladie de Still cause
La maladie de Still résulte d’un dérèglement du système immunitaire inné. Concrètement, certaines cellules de défense s’activent sans raison apparente et produisent des substances inflammatoires en quantité excessive, notamment l’interleukine-1 (IL-1) et l’interleukine-6 (IL-6).
Douleurs dans tout le corps : Ces molécules agissent comme des messagers de l’inflammation et déclenchent une cascade de réactions dans tout l’organisme. Résultat : fièvre, douleurs articulaires et manifestations systémiques diverses.
Quant aux facteurs déclenchants, ils restent partiellement mystérieux. Des chercheurs ont évoqué plusieurs pistes :
- Une prédisposition génétique (sans qu’on puisse parler d’hérédité directe)
- Des infections virales ou bactériennes qui pourraient servir d’élément déclencheur
- Des facteurs environnementaux encore mal identifiés.
Maladie de Still et stress : Déclenchement des crises
Le lien entre stress et inflammation fait l’objet d’une attention croissante dans la recherche médicale. Dans le cas de la maladie de Still, de nombreux patients rapportent que les périodes de stress intense précèdent souvent les poussées.
Ce n’est probablement pas un hasard. Le stress chronique modifie la production de cortisol et d’autres hormones qui régulent normalement l’inflammation. Quand ce système de régulation dysfonctionne, l’organisme devient plus vulnérable aux poussées inflammatoires.
Une étude publiée en 2018 dans le Journal of Rheumatology suggère que les événements stressants majeurs multiplient par trois le risque de poussée dans les maladies auto-inflammatoires. C’est considérable, même si la maladie de Still n’était pas spécifiquement ciblée dans cette recherche.
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Maladie de Still enfant (SJIA) : Spécificités
Éruption cutanée et fièvre : Symptômes caractéristiques chez l’enfant
La forme juvénile se manifeste typiquement avant l’âge de 16 ans, avec un pic entre 2 et 6 ans. Son tableau clinique est assez caractéristique, même s’il peut varier d’un enfant à l’autre.
La fièvre sans symptôme enfant (parfois) constitue souvent le premier signe. Elle est particulière : elle monte brutalement, souvent en fin de journée, dépassant 39°C, puis retombe à la normale en quelques heures. Ce cycle se répète quotidiennement, parfois pendant plusieurs semaines.
L’éruption cutanée accompagne fréquemment ces pics fébriles. Il s’agit de petites taches roses saumonées qui apparaissent principalement sur le tronc et les membres, puis s’estompent avec la fièvre. Ces éruptions peuvent démanger légèrement et sont parfois provoquées par la chaleur ou le frottement (phénomène de Koebner).
Arthrite juvénile idiopathique : Côté articulaire, les manifestations peuvent être diverses
- Douleurs diffuses au début
- Gonflement et raideur de certaines articulations (genoux, poignets, chevilles)
- Évolution possible vers une arthrite chronique
Plus rarement, on peut observer une augmentation du volume des ganglions lymphatiques, une inflammation des séreuses (péricarde, plèvre) ou une hépato-splénomégalie (augmentation du volume du foie et de la rate).
L’impact sur la croissance peut être significatif, surtout en cas de maladie non contrôlée ou de traitement prolongé par corticoïdes. Certains enfants présentent un retard staturo-pondéral qu’il faut surveiller attentivement.
Maladie de Still complications : Est-ce grave ?
La maladie de Still peut engendrer des complications sérieuses chez l’enfant. Le syndrome d’activation macrophagique (SAM) est sans doute la plus redoutable. Cette complication rare mais grave survient chez environ 10 % des enfants atteints de SJIA.
Les atteintes organiques peuvent également toucher différents systèmes :
- Cardiaques : péricardite, myocardite dans les cas sévères
- Pulmonaires : épanchements pleuraux, pneumopathies inflammatoires
- Hépatiques : perturbation des enzymes hépatiques, rarement insuffisance hépatique
Au-delà des aspects purement médicaux, n’oublions pas l’impact sur le quotidien. Les absences scolaires répétées, les limitations physiques et la difficulté à participer aux activités sociales peuvent perturber considérablement le développement psychologique. Certains enfants développent des troubles anxieux ou dépressifs face à cette maladie chronique imprévisible.
Maladie de Still adulte (ASD) : Particularités
Tableau clinique de l’adulte : Éruption cutanée et fièvre adulte
Chez l’adulte, la maladie de Still présente quelques différences notables. D’abord, elle peut survenir à tout âge, mais touche principalement les jeunes adultes entre 16 et 35 ans. La répartition hommes/femmes est relativement équilibrée, avec peut-être une légère prédominance féminine.
Les manifestations systémiques sont souvent au premier plan. La fièvre suit le même schéma que chez l’enfant,ces pics vespéraux dépassant 39°C qui retombent spontanément sont presque caractéristiques. L’éruption cutanée est similaire aussi, mais parfois plus discrète.
En revanche, les douleurs articulaires sont généralement plus prononcées chez l’adulte. Elles touchent fréquemment :
- Les genoux et les poignets (comme chez l’enfant)
- Les petites articulations des mains (plus spécifique à l’adulte)
- Les articulations temporomandibulaires (dans certains cas).
Les maux de gorge sont un symptôme particulièrement fréquent chez l’adulte, présents dans près de 70% des cas. Ils peuvent précéder les poussées et sont souvent confondus avec une simple pharyngite virale.
Difficultés diagnostiques chez l’adulte
Le parcours diagnostique est souvent long et tortueux pour les patients adultes. En moyenne, il s’écoule 6 à 10 mois entre les premiers symptômes et le diagnostic définitif. Pourquoi une telle errance ?
D’abord parce que la maladie de Still imite d’autres pathologies plus courantes. Les infections, certains cancers (lymphomes notamment) et d’autres maladies auto-immunes présentent des symptômes similaires.
Les marqueurs biologiques compliquent encore l’équation. La ferritine est souvent très élevée, mais ce n’est pas spécifique. La glycosylation de la ferritine (< 20 %) est plus caractéristique mais rarement dosée en routine. Quant aux anticorps habituels des maladies auto-immunes (facteur rhumatoïde, anticorps antinucléaires), ils sont typiquement absents.
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Diagnostic : Comment identifier la maladie de Still
Critères diagnostiques actuels
Face à la complexité diagnostique, plusieurs ensembles de critères ont été développés. Les plus utilisés sont ceux de Yamaguchi (1992) et de Fautrel (2001).
Les critères de Yamaguchi reposent sur une combinaison d’éléments majeurs et mineurs :
Pour poser le diagnostic, il faut au moins 5 critères dont 2 majeurs, et surtout exclure les autres causes possibles (infections, cancers, autres maladies inflammatoires).
Les examens biologiques montrent généralement :
- Une augmentation importante des marqueurs inflammatoires (CRP, VS)
- Une ferritine très élevée (souvent > 1000 ng/ml)
- Une anémie inflammatoire.
L’imagerie n’est pas spécifique, mais aide à évaluer l’atteinte articulaire. Les radiographies standards peuvent être normales au début. L’échographie et l’IRM détectent plus précocement les synovites et épanchements.
Maladie de still : Diagnostic différentiel
Le diagnostic de maladie de Still est avant tout un diagnostic d’exclusion. Il faut systématiquement écarter :
- Les infections bactériennes (endocardite, tuberculose) et virales (hépatites, HIV, parvovirus)
- Les néoplasies, particulièrement les lymphomes
- Les autres maladies inflammatoires (lupus, polyarthrite rhumatoïde débutante, vascularites)
Ce processus d’élimination explique pourquoi le parcours diagnostique est souvent long et semé d’embûches. Les patients racontent parfois avoir consulté trois ou quatre spécialistes avant d’obtenir un diagnostic définitif.
Maladie de Still traitements
Approches thérapeutiques chez l’enfant
Le traitement de la forme juvénile commence généralement par des médicaments relativement simples. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène ou le naproxène sont souvent la première étape. Ils soulagent efficacement les douleurs articulaires et peuvent réduire la fièvre.
Malheureusement, les AINS seuls suffisent rarement. La corticothérapie devient alors nécessaire, avec des spécificités pédiatriques importantes :
- Doses adaptées au poids de l’enfant (généralement 1-2 mg/kg/jour de prednisone)
- Attention particulière à la croissance et au métabolisme osseux
- Supplémentation systématique en calcium et vitamine D
La surveillance : Des bilans réguliers permettent d’ajuster les traitements. Ils comprennent des analyses sanguines, évaluation de la croissance, un examen ophtalmologique (risque de cataracte sous corticoïdes). La décroissance des corticoïdes doit être progressive pour éviter les rebonds inflammatoires.
Stratégies médicamenteuses chez l’adulte
Chez l’adulte, l’approche thérapeutique suit une logique similaire mais avec quelques nuances. Les AINS constituent là aussi une première ligne, mais leur efficacité est souvent limitée aux formes légères.
Les corticoïdes – prednisone en tête – restent la pierre angulaire du traitement. Les posologies initiales sont habituellement de 0,5 à 1 mg/kg/jour, parfois davantage dans les formes sévères. Chez l’adulte, la corticosensibilité est généralement bonne, avec une amélioration rapide des symptômes systémiques.
Cependant, les effets secondaires des corticoïdes sont nombreux et parfois problématiques sur le long terme : prise de poids, ostéoporose, hypertension, diabète, fragilité cutanée… D’où l’importance d’introduire rapidement des traitements de fond permettant de réduire la dose de cortisone.
Le méthotrexate est souvent le premier immunomodulateur utilisé, particulièrement efficace sur les formes à prédominance articulaire. La posologie hebdomadaire (15 à 25 mg) et la surveillance biologique régulière sont des points essentiels pour optimiser le rapport bénéfice/risque.
Vivre avec la maladie de Still au quotidien
Maladie articulaire rare : Gestion des poussées et prévention
Au-delà des médicaments, la gestion quotidienne joue un rôle crucial. Apprendre à reconnaître les signes avant-coureurs d’une poussée, fatigue inhabituelle, légers maux de gorge, raideurs matinales accrues, permet d’agir précocement. Pour prévenir ou atténuer les crises :- L’activité physique adaptée maintient la mobilité articulaire et renforce les muscles. La natation et le yoga sont particulièrement recommandés pour leur faible impact sur les articulations.
- La gestion du stress, souvent déclencheur de poussées, passe par différentes approches : techniques de respiration, méditation, psychothérapie si nécessaire.
- L’alimentation anti-inflammatoire, riche en oméga-3 et antioxydants, pourrait avoir un effet bénéfique, même si les preuves scientifiques restent limitées dans le cas spécifique de la maladie de Still.
Aspects psychologiques et soutien
L’impact émotionnel d’une maladie chronique comme la Still ne doit jamais être sous-estimé. Dépression, anxiété et sentiment d’isolement touchent de nombreux patients. La douleur chronique et l’imprévisibilité des poussées génèrent une fatigue psychologique considérable. Les groupes de parole et associations de patients constituent des ressources précieuses. Échanger avec des personnes qui comprennent vraiment ce qu’on traverse apporte un soutien inestimable. L’Association Française de la Maladie de Still propose régulièrement des rencontres et webinaires informatifs. La psychothérapie, notamment les approches cognitivo-comportementales, aide à développer des stratégies d’adaptation face à la maladie chronique. Certains centres proposent également des programmes d’éducation thérapeutique spécifiques.Maladie de Still espérance de vie
Évolution à long terme chez l’enfant
La question que tous les parents se posent : « Mon enfant guérira-t-il ? » La réponse est nuancée. Environ 30 à 40 % des enfants connaîtront une rémission complète après quelques années. Pour les autres, l’évolution se fait selon trois schémas principaux :
- Forme monophasique : une seule poussée suivie d’une rémission prolongée
- Forme polycyclique : alternance de poussées et rémissions
- Forme chronique : persistance de l’inflammation articulaire
Les séquelles articulaires dépendent largement de la précocité et de l’efficacité du traitement. Les thérapies modernes ont considérablement réduit le risque de déformations invalidantes qu’on observait autrefois.
Un suivi médical régulier reste indispensable, même en période de rémission, pour détecter précocement toute reprise de l’inflammation et ajuster les traitements.
Perspectives pour les adultes atteints
Chez l’adulte, l’évolution suit des schémas similaires, mais avec une tendance plus marquée à la chronicité. Les facteurs de bon pronostic incluent :
- Une réponse rapide au traitement initial
- L’absence d’atteinte articulaire destructrice précoce
- La possibilité de réduire progressivement les corticoïdes
L’espérance de vie n’est généralement pas réduite, surtout avec les traitements actuels. Cependant, la qualité de vie peut être significativement affectée, d’où l’importance d’une prise en charge globale.
Les comorbidités cardiovasculaires et métaboliques doivent faire l’objet d’une attention particulière. L’inflammation chronique et certains traitements (notamment les corticoïdes) augmentent ces risques. Un suivi cardiologique et métabolique régulier est recommandé.
Maladie de Still : La conclusion
La maladie de Still, qu’elle touche l’enfant ou l’adulte, présente des défis uniques tant pour les patients que pour les soignants. Les différences entre formes juvénile et adulte sont importantes à comprendre pour adapter la prise en charge.
La thérapie s’est considérablement enrichie ces dernières années, offrant de réels espoirs aux patients. Si autrefois le pronostic pouvait être réservé, aujourd’hui la majorité des personnes atteintes peuvent espérer une qualité de vie satisfaisante grâce aux biothérapies et à une prise en charge multidisciplinaire.
N’oublions pas l’importance d’un diagnostic précoce – plus tôt la maladie est identifiée, meilleur sera le pronostic à long terme. C’est pourquoi la sensibilisation du grand public et des professionnels de santé reste essentielle.


