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Scoliose et syringomyélie - Aspects orthopédiques chez l’adulte et l’enfant

Dr Stéphane Wolff

mercredi 3 décembre 2008

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Analyse de la déformation vertébrale, évaluation anatomique et traitement

Nous proposerons : une revue de la littérature chez l’enfant et la revue d’une série rétrospective chez l’adulte dans notre service.

Scoliose et syringomyélie de l’enfant

Chez l’enfant les séries publiées sont nombreuses et l’histoire naturelle assez bien documentée.
Cependant la fréquence exacte des syringomyélies est inconnue car il n’a pas été fait d’étude IRM systématique pour une population témoin de scoliose.

Par contre des scolioses dites « à risque »ont été identifiées et pour celles ci le taux de syringomyélie mesuré :
Weinstein(10) retouve ainsi un taux de 15 pour cent de syringomyélie pour son groupe à risque et les autres publications récentes retrouvent des chiffres comparables.
Les critères de scolioses à risque sont identiques dans toutes les publications :
- scoliose thoracique gauche, double et triple thoracique, et plus généralement scoliose à courbure inhabituelle (longue thoracique avec vertèbre limite inférieure sous D12)
- scoliose douloureuse, scoliose avec hypercyphose
- courbure évolutive à plus d’un degré par mois
- début rapide chez un enfant de moins de dix ans.
La prévalence des syrinx chez l’enfant (scoliose infantile) avec une scoliose de plus de vingt degrés est estimée a 21% (Dobbs et Lenke,2)

L’existence d’un signe neurologique oriente également vers la recherche d’une syringomyélie. Il peut s’agir d’une anomalie de l’examen clinique et l’absence d’un réflexe cutané abdominal est un signe évocateur.
Rappelons toutefois qu’il s’agit d’un signe inconstant dans les syringomyélies. Dans notre série rapportée un des patients avait des réflexes cutanés abdominaux normaux.
Winter (11) en 1997 a rapporté une étude d’IRM avant arthrodèse chez 140 enfants et adolescents avec une scoliose classée idiopathique : chez quatre enfants (3%) une anomalie de l’axe neurologique a été retrouvée.
Si le patient présente plusieurs signes à risque comme par exemple une courbure sévère chez un enfant de moins de dix ans avec une anomalie neurologique, l’IRM montrera alors dans plus de huit cas sur dix une anomalie de l’axe neurologique (Weinstein,10)

Toutes ces études permettrent de mieux cerner la prévalence exacte de l’association sans toutefois recourir à l’IRM systématique qui pour des raisons essentiellement financières n’est pas recommandée par la plupart des auteurs en particulier nord –américains.

La pathogénie de la scoliose reste discutée. Le mécanisme par atteinte de type paralytique est évidemment logique et évoqué mais d’autres hypothèses ont pu être avancées comme la traction médullaire.
Scoliose et syringomyélie s’associent à d’autres anomalies rachidiennes et médullaires avec de nombreuses combinaisons possibles :

L’association la plus fréquente unit scoliose de l’enfance, syringomyélie et malformation de Chiari de type 1 ou2.
A cette forme clinique peut s’ajouter une hydrocéphalie, une moelle attachée, un lipome et une diastématomyélie.

A coté de ces formes de l’enfance certaines associations peuvent avoir des signes dès les premiers mois de vie : Il s’agit des formes avec myéloméningocèle ou avec scoliose congénitale. Dans ces formes l’association avec l’hydrocéphalie est constante, la moelle attachée extrêmement fréquente et évidemment les signes neurologiques importants.

Le traitement :
Les années récentes ont été marquées par une augmentation, dans les formes associant syrinx scoliose et Chiari 1, des indications de décompression neurochirurgicale. En effet plusieurs études sont en faveur d’un effet bénéfique sur la syringomyélie et sur la déformation vertébrale de ces interventions.
(Flynn,4)
Cet effet bénéfique de l’intervention neurochirurgicale est d’autant plus efficace qu’il s’agit d’enfant jeune.
L’efficacité des corsets sur une scoliose avec syringomyélie est très inférieure aux résultats sur une scoliose idiopathique.
Les diverses associations lésionnelles sont à l’origine de nombreuses attitudes thérapeutiques qu’il est difficile de résumer.
Certaines formes avec une courbure de faible angulation et sans aucun signe neurologique sont surveillées ou traitées par corset.
S’il existe des signes neurologiques ou une courbure importante ou évolutive, le traitement du Chiari 1 sera chirurgical avec décompression et arthrodèse de la zone scoliotique.
Ghanem et Dubousset (5) qui ont rapporté une importante série française ont associé à la décompression une arthrodèse cervico-occipitale pour prévenir le risque de luxation cranio-cervicale qu’ils ont pu observer une fois après simple décompression.
Si une arthrodèse est envisagée pour une scoliose, tous les auteurs recommandent une décompression préalable.
Des cas de complications neurologiques notamment des paraplégies ont été observées après arthrodèse vertébrale avec syringomyélie méconnue (1,6,7,9)

Au contraire des articles, plus récents rapportant les résultats de la chirurgie vertébrale d’arthrodèse suivant une décompression, ne montrent pas de complication neurologique majeure ni même d’aggravation des symptomatologies neurologiques frustres (3)

Pour conclure cette revue de la littérature nous insisterons sur quelques points :

- Identifier des critères de scoliose« à risque de syringomyélie » lors de la consultation de toute scoliose avec un examen qui comprendra la recherche des réflexes cutanés abdominaux.

- L’IRM est indiquée pour ces scolioses à risque et pour nous pour toute scoliose qui va devoir être opérée.

- Il est impératif d’opérer les malformations de Chiari avant de réaliser une arthrodèse vertébrale pour scoliose.

- Le traitement par décompression occipito- cervicale est efficace sur les signes neurologiques parfois sur la courbure qui peut arrêter de progresser voire régresser. L’arthrodèse vertébrale est toutefois souvent nécessaire et se fera dans de bonnes conditions de sécurité.

Syringomyélie et scoliose chez l’adulte.

Etude rétrospective d’une série de sept patients adultes présentant l’association scolioseet syringomyélie.

Matériel et méthodes
Sept patients ont été traités chirurgicalement à l’hôpital Saint-Joseph entre 1990 et 2001.
Il s’agissait de quatre femmes et trois hommes avec un âge moyen de 43 ans (20-63).

Deux patients avaient déjà été opérés alors que la syringomyélie était méconnue et présentaient une pseudarthrose. Un de ces deux patients avait eu une complication neurologique après sa première intervention.
Quatre fois sur sept le diagnostic de syringomyélie était connu plusieurs années avant celui de la scoliose.
Six cas associaient une syringomyélie avec une malformation de Chiari1.

Ces scolioses avaient des caractéristiques communes :
Déséquilibre et cyphose.

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Scoliose déséquilibrante typique d’une syringomyélie de l’adulte

Tous les patients ont été opérés de la charnière cervico-occipitale puis de leur scoliose.
La technique utilisée a associé dans quatre cas un temps postérieur et un temps antérieur.
Un cas a été traité par une ostéotomie trans-pédiculaire
Et deux cas par une arthrodèse postérieure.
Les résultats :
Cette petite série est marquée par des complications fréquentes
Il n’y a pas eu de complications précoces importantes mais des complications secondaires :
Nous avons noté :
- un sepsis tardif (ostéotomie transpédiculaire)
- une pseudarthrose non reprise
- une pseudarthrose reprise
- un déséquilibre itératif avec reprise et extension de l’arthrodèse au sacrum

Dans trois cas sur sept il y a eu une aggravation neurologique dans les cinq ans qui ont suivi l’intervention
Et finalement perte de marche.
L’évolution a été aggravée par des chutes qui ont entraîné dans un cas une fracture de jambe et dans un autre une fracture du rachis au dessus de l’arthrodèse.
Les deux adultes jeunes traités par l’association décompression neurochirurgicale et arthrodèse vertébrale ont eu une évolution favorable sans complications et avec un état neurologique et orthopédique stable.

Discussion :

Nous n’avons retrouvé qu’une série comparable (8) rapportant des difficultés très similaires avec des complications fréquentes.
IL est évident que ces syringomyélies souvent évoluées avec des grandes déformations sont des défis mécaniques et biologiques.
Bien que la chirurgie soit souvent suivie de complications
Elle permet, au moins provisoirement, une nette amélioration de l’état clinique.

Conclusion :
La revue de cette courte série renforce le principe d’indication large dans l’enfance, de décompression neurochirurgicale et d’arthrodèse vertébrale. Pour les formes qui ont échappé à ce type de traitement et notamment des formes avec grand déséquilibre la chirurgie d’arthrodèse étendue est indiquée. L’utilisation de certaines améliorations techniques du matériel et des greffes, l’utilisation de cages intersomatiques permettra nous l’espérons d’améliorer nos résultats.

Bibliographie :

1. Charry O, Koop S, Winter R, et al. Syringomyelia and scoliosis : a

review of 25 pediatric patients. J Pediatr Orthop 1994 ;14:309–17.

2. Dobbs M , MD, et al

Prevalence of Neural Axis

Abnormalities in Patients with

Infantile Idiopathic Scoliosis

THE JOURNAL OF BONE JOINT SURGERY · JBJS.ORG

VOLUME 84-A · NUMBER 12 · DECEMBER 2002

3. Farley FA, Song KM, Birch JG, et al. Syringomyelia and scoliosis

in children. J Pediatr Orthop 1995 ;15:187–92. 4. Charry O, Koop S, Winter R, et al. Syringomyelia and scoliosis : a

review of 25 pediatric patients. J Pediatr Orthop 1994 ;14:309–17.

4. Flynn John M., MD,* et al

Predictors of Progression of Scoliosis After

Decompression of an Arnold Chiari I Malformation

spine 2004 Volume 29, Number 3, pp 286–29

5. Ghanem IB, Londono C, Delalande O, et al. Chiari I malformation associated

with syringomyelia and scoliosis. Spine 1997 ;22:1313–7

6. Huebert HT, Mackinnon WB. Syringomyelia and scoliosis. J Bone

Joint Surg [Am] 1969 ;51:338–43

7. Nordwall A, Wikkelson C. A late neurologic complication of scoliosis

surgery in connection with syringomyelia. Acta Orthop

Scand 1979 ;50:402–10.

8. Ono A, Ueyama K, Okada A, et al. Adult scoliosis in syringomyelia associated

with Chiari I malformation. Spine 2002 ;27:E23–8.

9. Schlesinger EB, Antunes JL, Michelson WJ, et al. Hydromyelia :

clinical presentation and comparison of modalities of treatment.

Neurosurgery 1981 ;9:356–65

10. Weinstein, MD* et al

A Prognostic Model for the Presence of Neurogenic

Lesions in Atypical Idiopathic Scoliosis

SPINE Volume 29, Number 1, pp 51–58

2003

11. Winter RB, Lonstein JE, Heithoff KB, et al. Magnetic resonance imaging

evaluation of the adolescent patient with idiopathic scoliosis before spinal

instrumentation and fusion. A prospective, double-blinded study of 140

patients. Spine 1997 ;22:855–858

Le support de présentation

Docteur Stéphane Wolff, Service d’Orthopédie _Fondation hôpital Saint-Joseph, Paris