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Symposium 2009

Bases anatomiques des douleurs pelvi-périnéales.

Pr Roger Robert

jeudi 19 novembre 2009

Vidéo présentation

L’embryologie nous enseigne que le pelvis et le périnée sont séparés l’un de l’autre par le diaphragme que constitue le muscle levator ani. S’insérant sur les trois éléments osseux de l’os coxal, il sépare des éléments dont l’innervation sera fort différente : dans la région infra-levatorienne (périnée), l’élément dominant de l’innervation et donc de la transmission des messages douloureux est le nerf pudendal. Par ailleurs, des sructures végétatives incluses dans le nerf pudendal ou gagnant les centres supérieurs par les lames sacro-recto-génito-pubiennes, prennent en charge les douleurs végétatives qui peuvent accompagner les douleurs pudendales somatiques. Dans la région supra-levatorienne (pelvis), le système végétatif est le seul mode d’innervation et transmet l’ensemble des messages douloureux.
La particularité des douleurs somatiques est d’être situées dans un territoire tronculaire bien défini. Les douleurs médiées par le système orthosympathique sont par nature diffuses et ont une connotation viscérale (sensation de corps étrangers intra rectaux ou intra vaginaux par exemple, impression de fesse ou d’organes génitaux froids ou brûlants, etc.).

Le périnée : Il se définit comme l’espace infra-lévatorien. Il est composé du secteur urogénital et du secteur anal. Il comporte les organes génitaux externes (vulve,clitoris, méat urinaire, ou scrotum, pénis et gland) et en arrière la région anale. Entre ces deux structures siège le noyau fibreux central du périnée. Les éléments cutanés de cette région sont innervés par le nerf pudendal essentiellement et les nerfs voisins qui, chevauchant son territoire, expliquent l’absence habituelle de déficit neurologique sensitif dans les compressions tronculaires du nerf. En profondeur et entourés par leurs fascias se situent les sphincters striés de l’anus et de l’urèthre, et les muscles érecteurs( ischio-caverneux, bulbo-caverneux). Sur le noyau fibreux central s’insèrent en deux couches les muscles transverses, superficiel et profond. Les douleurs périnéales sont donc situées dans les régions cutanées qui correspondent aux dermatomes des racines sacrées ou au territoire du nerf pudendal. D’autres éléments nerveux partagent leur territoire d’innervation sensitive avec lui : le nerf génito-fémoral, l’ilio inguinal, le nerf clunial inférieur et plus accessoirement le nerf obturateur. Cette trame nerveuse pluri-tronculaire explique les suppléances et donc le respect de la sensibilité dans le cadre des syndromes de souffrance tronculaire. Une anesthésie devra faire évoquer une souffrance radiculaire comme rencontrée dans le cadre des syndromes de la queue de cheval.
Il faut bien comprendre que les deux sources principales des algies périnéales tronculaires qui, seules, nous intéressent ici, tirent leur origine de deux régions différentes : origine sacrale pour les algies pudendales et cluniales inférieures, origine thoraco-lombaire pour les autres troncs nerveux responsables.
Ainsi, face à une algie périnéale, la topographie douloureuse, les irradiations, les circonstances déclenchantes et notamment positionnelles orienteront plus vers une souffrance pudendale (majorée par la position assise) ou une origine haute thoraco-lombaire accompagnée d’un syndrome de dérangement intervertébral mineur. Les algies pudendales dans le cadre d’un syndrome canalaire sont bien connues et identifiées. Elles correspondent aux critères de Nantes : douleur en position assise dans le territoire du nerf pudendal, ne réveillant pas le patient la nuit, s’accompagnant d’un examen neurologique normal, et réagissant de façon au moins transitoire aux infiltrations. Les douleurs cluniales inférieures proviennent d’une souffrance du rameau périnéal de ce nerf et entraînent des douleurs latéro-anales, scrotales ou labiales. Une infiltration spécifique sur le trajet de ce rameau lorsqu’il contourne l’insertion proximale des muscles ischio-jambiers sert de test diagnostique.
Le pelvis : Divisé en grand et petit bassin de part et d’autre de l’ouverture supérieure du pelvis, il correspond aux éléments osseux constitué des os coxaux, du sacrum et de la jonction lombo-sacrée, et du coccyx. Seul le petit bassin nous intéresse ici. Il contient les viscères uro-génitaux et le rectum. Ces viscères sont innervés par le système végétatif. Les nerfs afférents se regroupent dans la condensation mésenchymateuse infra-péritonéale et supra-lévatorienne plus connue sous le terme de lames sacro-recto-génito-pubiennes. Les ganglions hypogastriques inférieurs de Lee et Frankenhauser reçoivent les différentes informations qu’ils transmettent au plexus hypogastrique supérieur de Hovelaque au niveau de la jonction L4-L5. Ces voies afférentes ne seraient qu’orthosympathiques jusqu’à preuve absolue du contraire. Les fibres remontent ensuite, utilisant les vaisseaux comme vecteur jusqu’au rachis lombaire haut puis rejoignent les chaines ganglionnaires latéro-vertébrales , empruntent les rameaux communicants pour gagner les racines somatiques et entrer avec elles dans la moelle spinale. Les nerfs érecteurs (racines S2,S3,S4) décrits ainsi par Eckart sont essentiellement parasympathiques . Cependant, issus du plexus sacré par des racines communes avec celles du nerf pudendal, il est fort possible qu’ils servent de vecteur à la douleur végétative d’origine périnéale par le biais de fibres orthosympathiques centripètes. Les douleurs végétatives sont beaucoup moins nettes que les douleurs somatiques, prennent souvent la forme d’une douleur régionale profonde (sus pubienne, rectale, vaginale, vésicale) et ne doivent pas orienter vers une pathologie d’organe, ces organes étant les victimes et non les responsables morbides à part entière de la douleur.

La région glutéale : Définie comme la région crâniale et dorsale du membre pelvien et prolongeant les régions du dos, elle a pour limites la crête iliaque crânialement, le sillon glutéal caudalement, médialement la ligne unissant l’épine iliaque postéro-supérieure à la pointe du coccyx, latéralement la ligne passant par l’épine iliaque antéro-supérieure et le grand trochanter. Elle est recouverte par le muscle gluteus maximus sous lequel s’épanouissent latéralement les glutei medius et minimus et ventralement les muscles pelvi-trochantériens avec caudo-rostralement le piriforme, le jumeau supérieur, l’obturateur interne, le jumeau inférieur et le carré fémoral. Elle mérite d’être précisée ici puisqu’elle est la région de passage d’éléments nerveux et la zone d’insertion d’éléments musculaires et tendineux expliquant la génèse de certaines pathologie canalaires mais aussi les douleurs projetées via des contractures musculaires réflexes face à la douleur qui réalisent les syndromes myo-fasciaux. C’est dans la région glutéale que se situent les pinces ligamentaires menaçant le nerf pudendal qui peut, par ailleurs subir des compressions dans le canal pudendal d’Alcock. C’est aussi dans cette région que les muscles pelvi trochantériens et notamment l’obturateur interne mais aussi et surtout le piriforme se mettent en tension en réponse à une douleur, cette tension pouvant entraîner une souffrance des troncs nerveux voisins (ischiatique et nerf cutané postérieur de la cuisse) expliquant certaines projections douloureuses accompagnant les douleurs périnéales ou pelviennes.

Convergences neuro-anatomiques : Le tractus spino-thalamique est le vecteur central des douleurs. Il se forme dans l’isthme de la corne grise dorsale et reçoit les convergences des fibres extéro-,prorio- et interoceptives. Chaque feuillet transmet ainsi sa douleur. Le système végétatif, diffus, va transmettre la douleur végétative en empruntant plusieurs ganglions latéro-vertébraux. La douleur sera donc diffuse, plurimétamérique, profonde et peu précise. Au contraire, les douleurs médiées par le système somatique vont correspondre à un territoire franc d’un tronc nerveux périphérique ou d’une racine spinale. Ce sont des douleurs précises de diagnostic topographique plus aisé. Ensuite, tous les filtres de la douleur vont agir de façon à épargner la conscience neurocorticale sauf quand besoin se fait sentir. Le patient se plaint alors et le praticien, nourri de ces quelques rappels anatomiques, devra en faire la synthèse et orienter son diagnostic et, partant, sa thérapeutique.
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Bases anatomiques des douleurs pelvi-périnéales.

Bases anatomiques des douleurs pelvi-périnéales
Pr Roger Robert (Nantes) – 30 mn

Service de Neurochirurgie – CHU de Nantes