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Informations générales sur la Syringomyélie

lundi 7 avril 2008

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Pourquoi le liquide cérébro-spinal est-il susceptible de former une collection dans la moelle épinière ?

Le Professeur Ulrich Batzdorf (UCLA, Los Angeles) a l’habitude de considérer que c’est parce que le liquide circule mal à l’extérieur de la moelle épinière qu’il va pénétrer à l’intérieur de celle-ci et former d’années en années une collection qui longtemps peut rester silencieuse et n’occasionner aucune gêne. On rappelle que le cerveau et la moelle épinière sont entourés des méninges et qu’entre le cerveau ou la moelle et les méninges (la dure mère) circule ce liquide cérébro-spinal.

Comment fait-on habituellement le diagnostic de Syringomyélie ?

Ce diagnostic est basé sur l’IRM (imagerie en résonance magnétique) médullaire et en particulier sur les séquences dites sagittales T2 de l’IRM qui permettent de visualiser le LCS avec une tonalité blanche (Hypersignal). Sur cet examen votre médecin est à même de préciser l’extension de la cavité syringomyélique en hauteur (plan sagittal), d’avant en arrière et en largeur (plan axial) et de dire si l’extension prédomine d’un côté.

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Syringomyélie cervico-thoracique sur une séquence sagittale T2

Les symptômes que vous présentez sont-ils bien en rapport avec la syringomyélie ?

Il est important de pouvoir répondre à cette question afin de mieux connaître sa maladie et aussi de pouvoir écarter certaines gênes qui n’ont aucun lien avec cette affection. Seul l’examen neurologique permet cette synthèse. La syringomyélie se développant dans la moelle épinière, il va s’installer un syndrome dit « centro-médullaire ». Cela se traduit par une atteinte des sensibilités élémentaires souvent dissociée et suspendue. On perd sur un segment de membre (par exemple un avant bras) la sensibilité au chaud ou au froid. En même temps apparaissent des fourmillements, engourdissements, picotements ou brûlures et décharges électriques. On risque alors de se brûler sans s’en rendre compte (parce qu’on ne ressent pas le chaud) ou voir un panaris évoluer sans occasionner vraiment de douleur. A un stade plus avancé, une perte de force motrice peut apparaître. La marche peut devenir instable. Ailleurs des douleurs nucales ou occipitales sont majorées par l’effort, la toux, et sont associées à l’anomalie de la charnière crânio-cervicale.

Peut-on être sur qu’il ne s’agit pas d’une tumeur ?

Parfois le terme de « kyste syringomyélique » est utilisé. Dans l’esprit de beaucoup de personne le terme de kyste est associé à une tumeur ou un cancer. Dans l’immense majorité des cas, il n’y a pas de tumeur et il n’y a donc pas lieu de s’en inquiéter pour cela. L’IRM de la moelle comporte au moins lors d’un examen une injection de produit de contraste. Ceci permet d’éliminer plus formellement une très exceptionnelle tumeur intra-médullaire.

Quelles sont les précautions particulières qu’il faut prendre pour éviter que la situation ne se modifie ?

L’objectif est bien entendu de vivre le plus normalement que possible. Les loisirs et l’activité professionnelle peuvent être poursuivis parfois au prix de quelques aménagements. Il faut tout de même faire attention à éviter les sports trop violents ou qui occasionnent des efforts répétitifs (VTT, équitation…) notamment avec hyperpression thoracique (haltérophilie, plongée). Il est préférable de traiter une bronchite chronique qui risque d’augmenter la pression veineuse autour de la moelle.

Que faire pour calmer des douleurs qui deviennent plus permanentes ?

Si les douleurs apparaissent ou se modifient, il faut réévaluer la situation clinique en se faisant réexaminer cliniquement par le médecin traitant ou le spécialiste. Bien souvent une nouvelle IRM sera utile pour pouvoir ré-analyser la cavité syringomyélique et rediscuter du traitement de celle-ci. Mais les médicaments prescrits sont ceux généralement donnés pour ce que l’on appelle des douleurs neuropathiques. Ces douleurs sont en fait la conséquence non pas d’une inflammation mais d’une fragilité du système nerveux. Bien souvent, on ne ressent plus bien le contact des vêtements ou le toucher et en même temps cela fait mal. Les médicaments utilisés sont alors surtout ceux qui ont par ailleurs une action sur le système nerveux. En effet on s’est rendu compte que des traitements contre l’épilepsie pouvaient être efficaces contre les douleurs neuropathiques. Il en est de même pour les traitements antidépresseurs. Il est recommandé lorsque ces douleurs deviennent plus fortes de consulter un neurologue ou un centre anti-douleur spécialisé dans les douleurs chroniques neuropathiques. Certaines douleurs relèvent de mécanismes différents. Des contractures des muscles para-vértébraux peuvent être calmées par des massages ou des décontracturants.

Quel est le lien entre l’anomalie de Chiari et la syringomyélie ?

L’anomalie de Chiari correspond à une insuffisance de développement osseux de la fosse cérébrale postérieure qui est donc de petite taille. Le cervelet est normalement développé mais à l’étroit et les amygdales cérébelleuses sont en position basse, dans le canal cervical. La grande citerne est en règle absente. Il en découle une gêne à l’écoulement du LCS. Certaines anomalies de Chiari sont isolées ; dans d’autres cas, une syringomyélie se développe. Une hydrocéphalie ou d’autres anomalies osseuses peuvent être décrites telles qu’une invagination basilaire, une occipitalisation de C1. L’anomalie de développement dans ce cadre concerne l’os et les enveloppes méningées alors que le cerveau et la moelle sont normalement développés. La gêne clinique peut être liée au Chiari et aux douleurs occipito-nucales parfois positionnelles, fourmillements des pieds ou des mains, troubles de l’équilibre, nystagmus. Les symptômes peuvent être ceux de la syringomyélie.

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Charnière crânio-cervicale normale
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Anomalie de Chiari type 1
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Anomalie de Chiari type 2





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Chiari + Syringomyélie

Qu’appelle-t-on syringomyélie post-traumatique ?

Il s’agit de formes de syringomyélie qui se développent à distance (en règle générale après plusieurs années) après un traumatisme vertébro-médullaire sévère. Un accident grave de la route, une chute d’un échafaudage provoque une fracture d’une vertèbre et une paralysie (souvent une paraplégie). Quelques années après l’accident peuvent apparaître des picotements d’une main, une partie du thorax sur laquelle la sensibilité est diminuée, des douleurs, mais aussi, une modification de la spasticité des jambes ou une modification de la commande de la vessie (infections urinaires plus fréquentes, troubles de la compliance vésicale). L’IRM de la moelle permet le diagnostic. Il faut distinguer dans ce cadre les myélopathies kystiques post-traumatiques non évolutives et les syringomyélies (formes progressives). Les rééducateurs sont habitués à ces diagnostics.

A quoi correspond l’arachnoïdite ?

L’arachnoïde est un des feuillets des méninges qui limite l’espace de circulation normal du LCS (espace sous-arachnoïdien). En temps normal, l’arachnoïde est translucide, fin comme le voile d’une mariée. Après une agression des méninges (traumatisme grave, méningite, hémorragie méningée), une cicatrice se forme et bloque l’écoulement du liquide cérébro-spinal. Cela constitue le point de départ à partir duquel se développera la syringomyélie. La syringomyélie post-traumatique est donc une syringomyélie post-arachnoïdite mais segmentaire et focale. Les formes post-infectieuses (méningite) correspondent à des arachnoïdites diffuses et sont beaucoup plus difficiles à contrôler.

Ce n’est pas une syringomyélie mais un « petit kyste de la moelle », qu’est ce que cela signifie ?

L’imagerie en résonance magnétique montre la moelle comme jamais auparavant il n’était possible de la visualiser. La facilité d’accès à ces IRM fait que l’on voit parfois quelques variations anatomiques qui ne sont pas très éloignées de la normale. Ainsi un reliquat de canal centromédullaire peut parfois être vu et décrit à tort comme une syringomyélie. Nous manquons de connaissance précise sur ces situations ; mais celles-ci ne paraissent pas être évolutives. Le reliquat de canal épendymaire se distribue à la jonction du 1/3 antérieur et du 1/3 moyen dans le plan sagittal et habituellement reste limité à 2 myélomères ou moins.

Ce n’est pas une syringomyélie

Il s’agit bien d’une syringomyélie mais on ne retrouve pas la cause et en particulier il n’y a pas d’anomalie de la charnière crânio-cervicale ! Y-a-t-il quand même une explication ? Certaines séquences IRM dites séquences infra millimétriques écho de gradient T2 permettent de visualiser des brides arachnoïdiennes extra médullaires qui constituent l’obstacle à la circulation du LCS à l’origine de la cavité intra médullaire. Leur identification reste difficile et ce n’est parfois qu’après plusieurs études en IRM (étude de flux conjointe) qu’il devient possible de les reconnaître.

Les formes de l’enfant sont-elles très différentes de celles de l’adulte ?

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Bride arachnoïdienne à l’origine de l’obstacle à l’écoulement du LCS

Disons qu’elles posent des problèmes effectivement bien différents. Les syringomyélies de l’enfant, sont des pathologies non rares qui peuvent survenir dans deux contextes bien différents : celles qui sont reliées à une anomalie de circulation du liquide céphalorachidien au niveau de la charnière crânio-rachidienne et les autres.

Contrairement à l’adulte où la malformation de Chiari résume la majorité des anomalies de charnière, les enfants présentent également de nombreuses malformations osseuses qui peuvent s’accompagner d’une syringomyélie (achondroplasie, muccopolysaccharidose, trisomie 21, Marfan, ostéogénèse imparfaite …) ou plus rarement des séquelles des souffrances néonatales (arachnoidite de grande citerne). Le mode de révélation est différent selon l’âge. Chez le nouveau-né et durant les premiers mois de vie, les anomalies osseuses sont plus fréquentes que le Chiari et ne manifestent pas des douleurs cervicales mais une hypotonie axiale ou des troubles respiratoires pouvant réaliser un véritable syndrome d’apnée du sommeil ou sont parfois de découverte systématique lors du bilan de ces maladies. Chez le plus grand enfant et chez l’adolescent, le Chiari est prédominant et se manifeste par des troubles de la statique rachidienne (scoliose) associés parfois à des signes neurologiques à minima (abolition des reflexes cutanés abdominaux).

La scoliose est également le signe révélateur des syringomyélies isolées de l’enfant et de l’adolescent. Ces syringomyélies ne sont jamais évolutives et modifient simplement la prise en charge de ces scolioses. Les syringomyélies post-traumatiques sont exceptionnelles chez l’enfant.

Enfin, 20 % environ des dysraphismes lombosacrés (moelle attachée basse), présentent des syringomyélies. On considère ces syringomyélies comme malformative, dans la très grande majorité des cas, elles sont stables, ne s’accompagnent d’aucun signe clinique supplémentaire à ceux du dysraphisme et ne nécessitent pas de prise en charge chirurgicale.

Il faut souligner, que contrairement à l’adulte, les syndromes douloureux rebelles aux traitements ne se voient pas chez l’enfant.

Le spina peut-être associé à une syringomyélie, qu’en est-il ? Qu’est ce que le spina-bifida exactement ?

Le spina-bifida se définit par l’absence de fermeture postérieure du canal osseux dans lequel se trouve la moelle épinière. Le degré de l’anomalie est variable. On distingue : les spina-bifida occulteset les spina-bifida ouverts (1 cas sur 800 naissances). La cause est inconnue mais il existe une prédisposition familiale (facteurs génétiques multifactoriels). Par ailleurs, plusieurs études ont mis en évidence le rôle d’une carence en acide folique en début de grossesse. Le risque général pour une femme enceinte d’avoir un enfant présentant cette anomalie est près de 1 pour 1000. L’échographie fœtale en fait le plus souvent le diagnostic. La ponction amniotique à la 14e-16e semaine permet de doser l’alphafeotoprotéine et l’acétylcholinestérase. Un taux élevé traduit une anencéphalie (absence de cerveau) ou un spina-bifida. Une éventuelle décision d’interruption thérapeutique de grossesse en cas de non-fermeture importante peut alors être prise.

Les spina bifida occultes : en général, ils n’entraînent aucun symptôme et ne nécessitent aucun traitement. En cas de fistule dermique (trou dans la peau) faisant communiquer les méninges avec l’extérieur, on peut observer des méningites à répétition. Un traitement chirurgical est alors nécessaire.

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Spinalipome moelle basse attachée

Les spina bifida ouverts sont représentés par les méningocèles et les myéloméningocèles. Ils forment une tuméfaction médiane du bas du dos. Les troubles neurologiques peuvent être importants : paralysie flasque des membres inférieurs, pieds-bots, luxation paralytique des hanches, atteintes sphinctériennes anale et surtout vésicale avec rétention ou incontinence urinaire et/ou fécale. Une hydrocéphalie est souvent associée, plus rarement une syringomyélie et ou un Chiari. Les complications infectieuses locales sont responsables de méningites. Les troubles vésicaux sont responsables d’infections urinaires, de pyélonéphrite chronique. Le traitement est complexe et repose avant tout sur la prévention par la prise d’acide folique.

Il est recommandé aux femmes en âge de procréer de consommer des aliments riches en folates : légumes verts à feuilles, légumes secs, agrumes. Par ailleurs, une supplémentation systématique à débuter 4semaines avant la conception (et à poursuivre 8semaines après) doit être instaurée chez les femmes à risque : grossesse antérieure avec anomalie de fermeture du tube neural ; prise de certains médicaments anti-épileptiques pouvant induire une carence en folates : phénobarbital, phénytoine.

Quel problème pose la scoliose de l’enfant, et qu’en est-il du risque de syringomyélie sous-jacent ?

Chez l’enfant les séries publiées sont nombreuses et l’histoire naturelle assez bien documentée. Cependant, la fréquence exacte des syringomyélies est inconnue car il n’a pas été fait d’étude IRM systématique pour une population témoin de scoliose. Par contre des scolioses « à risque » ont été identifiées et pour celles-ci le taux de 15 pour cent de syringomyélie mesuré. Les critères de scolioses à risque sont identiques dans toutes les publications :

  • scoliose thoracique gauche, double et triple thoracique, et plus généralement scoliose à courbure inhabituelle (longue thoracique avec vertèbre limite inférieure sous D12)
  • scoliose douloureuse, scoliose avec hypercyphose
  • courbure évolutive à plus d’un degré par mois
  • début rapide chez un enfant de moins de dix ans.La prévalence des syrinx chez l’enfant (scoliose infantile) avec une scoliose de plus de vingt degrés est estimée à 21%. L’existence d’un signe neurologique oriente également vers la recherche d’une syringomyélie. Il peut s’agir d’une anomalie de l’examen clinique et l’absence d’un réflexe cutané abdominal est un signe évocateur. Rappelons toutefois qu’il s’agit d’un signe inconstant dans les syringomyélies. Si le patient présente plusieurs signes à risque comme par exemple une courbure sévère chez un enfant de moins de dix ans avec une anomalie neurologique, l’IRM montrera alors dans plus de huit cas sur dix une anomalie de l’axe neurologique.
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Scoliose avant et après chirurgie